Videodrome 1983 David Cronenberg
Because it has something...that you don't have, Max. It has a philosophy...and that is what makes it dangerous.
Max dirige une chaîne TV pour adultes. Voilà que son technicien pirate un programme plutôt costaud montrant des scènes de torture qui semblent non simulées. Y voyant une opportunité mais aussi plus fasciné qu’il ne veut l’admettre, il décide de remonter à sa source. Il commence à avoir des hallucinations, causées par ce programme, qui n’a jamais été vraiment diffusé mais qu’un groupe nationaliste lui à montré à dessein, dans le but de prendre le contrôle de son esprit. D’abord je dois dire que les dernières quinze minutes laissent un peu dubitatif, non pas qu’elles ne soient pas cohérentes, mais après plus d’une heure plus que passionnante, ça sent, un peu, la conclusion forcée, alors que le récit aurait pu continuer encore longtemps tant il ouvre des possibles, comme si l’on était qu’au début de cette nouvelle chair dont Cronenberg prône l’avènement, de ce nouvel être conscient de et transformé par ce flux incessant d’images, de cette nouvelle réalité (mais peut-être que ce film dense m’a juste largué avant la fin). Cette réserve étant faite, louons ces multiples idées visionnaires puisque plus que jamais d’actualité presque quarante ans après, remarquables, passionnantes, vertigineuses, effrayantes. Encore une fois Cronenberg filme littéralement, viscéralement, des concepts à priori difficiles à mettre en image, comme une cassette vidéo organique qu’on insère dans le ventre de James Wood le magnétoscope humain, par une fente très vaginale, pour signifier l’emprise des images, l'altération de la réalité et la programmation des esprits. C’est déjà fort, mais en plus le faire sans qu’on éclate de rire, faire qu’on y croit, chapeau bas. Évidemment Cronenberg n’est pas intéressé par le gore pour le gore, la chair est toujours la représentation d’un psychisme torturé. On le disait, les thèmes sont multiples et interconnectés, la fascination pour les images bruts et violentes consommées sans recul, la façon dont elles altèrent notre perception de la réalité, le contrôle des esprits par les groupes médiatiques à des fins mercantiles et fascistes, la virtualité, la fusion du corps et de la machine, rien de bien nouveau mais la démonstration est géniale. La mise en scène et la narration efficaces distillent un climat trouble et anxiogène, Max doute de la réalité de ce qu'il voit et on se demande avec lui si le film n’est pas autre chose qu’un long cauchemar qu'il fait devant sa TV restée allumée. Enfin Cronenberg dispose enfin cette fois de l’acteur qu’il fallait pour porter sa vision, et d’ailleurs tout le monde est bon. C’est son premier film totalement réussi en même temps qu’il clôt sa première période, peut-être son meilleur. Peut-être un bon prétendant au film de la décennie ? (vu en 2021)